Manifeste national-socialiste
C'est dans un contexte d'avènement des mouvements socialistes et nationalistes à l'échelle de la planète, que le «Manifeste national-socialiste» est réalisé. Il se veut plutôt une allégeance aux idées de Lénine, Mussolini , Hitler et Kémal Ataturk qu'un véritable programme d'action pour l'établissement d'une «dictature» de nature national-socialiste.
Un jour, pour la plus grande peur des bien-pensants, Lénine lâcha à la tête de l'Europe son apophtegme devenu fameux: le parti bolchevick n'a pas besoin d'intellectuels. En 1934, Mussolini reprend à son compte la formule léniniste et déclare à ses fascistes qu'il entend bouter hors du parti les têtes trop fortes de haut-savoir. En 1935, Hitler, ne dit rien mais fait exactement la même chose. Depuis longtemps déjà, Kémal avait saisi l'idée.
J'admire Lénine, Mussolini, Hitler, Kémal.
De suite, j'établis la différence entre l'État et la Nation. L'État c'est le pouvoir. C'est la chose de l'homme qui commande à la nation au nom d'un parti. La Nation c'est la masse qui produit au prix du moindre effort et en vue de la plus grande jouissance. La Nation doit être menée par l'État, l'État par un parti, le parti par un chef.
Le parti - l'État - n'a pas besoin d'hommes non-producteurs: artistes, poètes, philosophes. Ce qu'il lui faut: des paysans, des techniciens, des économistes, des politiques. L'État doit être la chose des producteurs.
Autre chose est la Nation. À elle appartient les créations qui ne sont pas d'une nécessité vitale pour la collectivité.
De ceci, il résulte que l'État et la Nation ça fait deux et non pas un.
À cela, vous me répondrez que cette théorie est un décret de mort pour plusieurs. D'accord. Seulement comme disait Richelieu qui sut toujours raison garder, on ne joue pas aux échecs avec un bon coeur et on conduit les hommes avec la tête. Et encore comme disait Mussolini: l'individu est un moyen, l'État est le but.
Et cela aussi est fameusement vrai: égoïsme national et sacré.
J'avais besoin de dire ceci pour bien faire comprendre ce qui va suivre.
Grâce aux actes intellectuels, les actes musculaires sont de moins en moins des obligations de l'espèce humaine. La mécanique qui est un bienfait, tend de plus en plus à intellectualiser l'effort. - c.à.d. pour employer la formule de Valois, la transformation de l'effort par le moyen du travail cérébral.
Il ne s'agit pas d'être pour ou contre l'intellectualisme de l'effort. C'est un fait: il faut l'accepter.
Autre chose.
Le monde nouveau est appelé à se prononcer entre les deux seules organisations rationnelles de la production qui soient: le néo-capitalisme américain, le soviétisme russe,. Et ici se place la remarque judicieuse qu'on trouve dans la préface du Discours sur le Plan Quinquennal de J. Staline. À savoir:
"que l'économie russe et l'économie américaine ont les mêmes formes essentielles et qu'elles ne diffèrent que par le commandement (cinquante magnats en Amérique; cinquante commissaires du peuple en U.R.S.S.) et la répartition des profits (qui vont au capitalisme en Amérique; à l'État populaire en U.R.S.S.). "
On aura beau regretter le temps jadis, la libre concurrence et la décentralisation économique - on n'y changera rien. C'est un monde nouveau qui s'amène. Nous devons:
accepter et pousser l'intellectualisation de l'effort.
choisir entre les deux seules formules d'économie dirigée qui existent: le néo-capitalisme américain, le soviétisme russe.
Le choix est quasi fait: le monde - ne vous effarouchez pas - opte pour le soviétisme russe et il a fameusement raisons.
Et ici se pose la question, qu'est-ce que le soviétisme russe?
Réponse: c'est du fascisme au carré, ou plutôt du corporatisme, du socialisme intégral, de l'économie dirigée.
Il faut absolument qu'on se mette dans la tête que le communisme en fait n'existe pas Le soviétisme n'est pas du communisme, c'est plus simplement du socialisme autrement dit la production organisée et réglée par l'État. En d'autres termes cela veut dire le rendement du travail-nation au profit du capital-état.
Tout ce qui touche de près, qui est en liaison directe avec les besoins de la collectivité, doit être la propriété de l'État. Il est stupide de laisser les richesses nationales, le sort d'une masse prolétarienne, entre les pattes du capital individuel. Et ça pour trois principales raisons:
le dynamisme de la production. La mécanique - l'Acte intellectuel pour le profit de l'acte musculaire - devenant la base même du travail, il en résulte que ce dynamisme nouveau produit un gonflement de la production et - du même coup - un dégonflement du travail dans le prolétariat.
la production organisée. " Les producteurs étant hors d'état de connaître, individuellement et même syndicalement, les besoins de la consommation, il s'ensuit que la production se fait à l'aveuglette et aboutie soit à une surproduction absolue, soit à une surproduction relative" - G.V. - Et cela nous amène à dire, que l'économie dirigée est un fait qui s'impose.
le capital et le travail. " Le vice du système monétaire actuel, c'est que l'instrument monétaire demeure fixe tandis que les prix varient sans que la puissance d'échange des marchandises varie". G.V. - Et la conclusion est, que le capital individuel - puisqu'il ne peut se plier fait faillite et paralyse le travail collectif - c.à.d. la crise, le chômage.
Conclusion: une économique nouvelle - dirigée.
Cette économique nous en trouvons la formule dans l'évolution du fascisme.
L'évolution simultanée et parallèle du soviétisme et du fascisme finira nécessairement par produire la courbe qui rattachera à un même vertex Mussolini et Lénine - les deux fanaux rouges d'un nouveau Moyen-Âge.
En étatisant les grandes industries nationales et le gros capital, et de plus en créant l'organisme des corporations, l'Italie nouvelle déplace sensiblement l'axe de son économique. De son côté le soviétisme fait sa courbe. Oubliant volontairement les symboles rococos et humanitaires de quelques vieux doctrinaires déguenillés, le soviétisme se cristallise, et se ramasse tout, dans l'idée fondamentale de Lénine, tout le pouvoir au Soviet. Du coup nous avons l'unité de direction et la reconnaissance du principe de continuité. De plus, laissant tomber le mythe du communisme intégral - mythe dont Lénine s'était servi pour les besoins d'une révolution mais qu'il eut le bon sens d'oublier une fois au pouvoir - la centrale bolchevick, entre les mains de Staline qui est à lui seul l'union des républiques sociales soviétiques, ne pense plus qu'à créer un vaste système de production organisée. - Le communisme est devenu du socialisme intégral qui reconnaît les droits de la petite propriété tout en évitant les risques du capital.
Résultat:
le fascisme ramène le capital à l'État totalitaire.
le soviétisme lâche la petite propriété à l'individu c.à.d. à la Nation.
Et la boucle est bouclée.
Quand on prend de l'histoire une vue d'ensemble qui ramasse dans un même plan Sylla et Mussolini en passant par Machiavel, on forme le grand cycle du " politique d'abord". (...)
S'il y a une chose qui appartient exclusivement à l'État - et non à la Nation - c'est bien la politique. Encore plus que l'économique, la politique doit être concentrée entre les mains d'un seul chef qui en assurera la continuité. D'ailleurs - et dans le monde nouveau plus que jamais - la politique et l'économique doivent être deux choses séparées - dont seulement l'unité de direction et de commande sera le pouvoir d'un seul chef.
Il faut toujours se souvenir que c'est une grande politique qui assurera une armature puissante à l'économique d'un pays, et non l'économique qui lui donnera une politique.
Et c'est pourquoi le pouvoir sera un et absolu.
C'est la courbe qui part de Charles Maurras, pour aboutir à Lénine. (...)
En effet, Charles Maurras et Lénine peuvent être d'opinion contraire sur la valeur d'un plan économique, mais soyez sûrs qu'ils se rencontrent sur le plan politique qui met tout le pouvoir entre les mains d'un homme qui appuie son droit sur sa force et non sa force sur son droit.
Ainsi l'économique d'un pays sera en liaison directe avec la puissance politique.
C'est la conclusion fasciste.
En socialisant les utilités publiques et la richesse nationale, et en fondant dans des corporations les arts, métiers et industries de l'Italie nouvelle, Mussolini a débarrassé - pour une époque qui sera longue - son pays du libéralisme économique et du néo-capitalisme. L'organisme nouveau qui conduit l'Italie vers son Destin a ceci de particulier et d'intéressant qu'il sépare intégralement l'économique de la politique.
D'un côté les corporations entre les mains de techniciens et d'hommes du métier; de l'autre, le pouvoir politique détenu par les hommes d'un parti qui repose sa puissance sur la force en armes. Et au milieu, Mussolini qui détient l'unité de direction.
Mussolini est le créateur d'un monde nouveau.
Et nous arrivons ici, à notre destinée à nous - au devenir du pays de Québec.
On n'ente pas un peuple sur un autre comme on greffe un oranger sur un citronnier.
Cela pour dire que l'unité canadienne est un mythe à ou bien l'élément français du Canada sera noyé par l'élément saxon, ou bien les deux éléments, tant et tant mélangés, formeront un élément nouveau qui sera ni l'élément saxon proprement dit, ni l'élément français continué.
Avec ces deux "ou-bien-là" le nationalisme français d'Amérique disparaît.
La Confédération canadienne qui nous étouffe sur le plan démographique sera toujours pour nous le rideau métallique qui empêchera l'explosif français; nous sortirons de la Confédération.
Nos chefs sont des vieillards - respectueux de la loi.
La loi veut que nous soyons en Confédération.
La loi veut que nous ayons une économique bâtarde.
J'appuie surtout sur l'économique. Le prolétariat peut ne pas être nationaliste, mais quand il a faim le prolétariat est nécessairement dynamique et révolutionnaire.
Ici se vérifie la grande loi du matérialisme historique formulée par Karl Marx:
" Le mode de production de la vie matérielle détermine, d'une façon générale, le procès social, politique et intellectuel de la vie. Lorsque, par leur développement, les forces productives de la société sont en contradiction avec les rapports de propriété au sein desquels ces forces productives se meuvent, naît une époque de révolution sociale."
Mais comme chez nous l'économique est plus particulièrement attachée à notre politique, il se produit ceci:
Pour se rebâtir une économique, il nous faut d'abord - et ça pour des raisons que vous savez:
briser l'organisme actuel de notre politique.
briser le rideau métallique saxon.
De ce fait le prolétariat est obligatoirement nationaliste: la révolution sociale est la continuité d'une révolution nationale.
Et c'est la création d'un parti national-socialiste qui s'impose pour nous.
Le parti national-socialiste n'a pas besoin d'intellectuels.
Mais il y a plus. L'intellectuel est généralement un tourmenté qui s'embarrasse le cerveau de raisonnements superflus et inutiles. Au contraire l'homme d'action, le militant, travaille vite et s'appuie les pieds sur un matérialisme pratique et sûr.
L'intellectuel ne comprendra jamais qu'agir est 1,000,000 de fois plus beau que de penser. N'étant pas un producteur - technicien, paysan, économiste - il ne peut comprendre que le Das Kapital de Karl Marx et lEnquête sur la monarchie de Charles Maurras sont plus nécessaires au populaire que le baiser au lépreux de François Mauriac ou La critique de la Raison pure de monsieur Kant.
Le parti national-socialiste n'a pas besoin non plus de vieillards respectueux des lois. Et ça pour deux raisons:
les vieillards ne comprennent jamais les choses nouvelles.
les vieillards ont des habitudes qui sont la peur de vivre, l'effort minimum et la crainte de l'inconnu, lequel inconnu est toujours synonyme de mort dans l'esprit d'un vieillard.
Tout comme il ne s'occupera pas des intellectuels, le parti national-socialiste laissera dans leur paix, les vieillards.
Et j'arrive à la fin.
Sans espoir dans ses chefs, sans destinée, la jeunesse du Canada français a perdu son axe et coule.
Ne pouvant compter sur personne pour la repêcher il faut absolument qu'elle se sauve elle-même.
Comment?
En devenant un parti de renaissance nationale et sociale.
Et je suis sûr que cela sera avant longtemps: la faim fait sortir les loups du bois.
La jeunesse a faim - une faim qui tire le ventre et annonce une extraordinaire volonté de création et de travail.
Sources : Jean-Louis Gagnon, " Politique ", dans Vivre, 16 avril 1935, p. 2 tiré dans Daniel Latouche et Diane Poliquin-Bourassa, Le manuel de la parole, manifestes québécois, Tome 2 1900 à 1959, Montréal, Éditions du Boréal Express, 1978, pp. 161-165.
Numérisé par Igor Tchoukarine, Université de Sherbrooke